Dans l’avant-propos paru après les attentats de janvier (voir Ven 559, en avril 2015) nous affirmions l’urgence de prendre en compte les analyses et les propositions portées par le collectif Enjeux e-médias au sein même de la refondation de l’école et d’autre part de faire entrer ces enjeux dans les médias eux-mêmes.
Parce que les réseaux sociaux constituent aujourd’hui le principal outil d’information et de consultation des jeunes, bien avant la télé et la presse papiers, les attentats meurtriers du 13 novembre placent à nouveau l’éducation aux médias et à l’information (EMI), ses compétences et ses valeurs, au cœur des enjeux de démocratie, comme l’écrit Divina Frau-Meigs dont nous reprenons ici à notre compte des extraits de ses récentes analyses parues sur le site national des Ceméa dans la rubrique Enfants, écrans, jeunes et médias.
« Les attentats nous incitent à considérer Internet comme un média à part entière et nous exhortent à mettre la gouvernance de l’Internet dans l’agenda de l’EMI, pour donner des moyens d’action à des citoyens en devenir qu’on ne saurait réduire à des usagers […]
La question de la liberté d’expression et de publication tout comme celle de la vie privée et de la propriété des données – des composantes majeures de l’EMI notamment dans le cadre de l’expression des élèves – se posent désormais de façon cruciale, en relation à l’importance prise par les réseaux sociaux et les plateformes numériques lors de tels événements majeurs. Les jeunes ont besoin d’un ensemble de compétences remises à jour et étendues pour maîtriser les cultures de l’information. Ces compétences relèvent d’apprentissages permettant de comprendre les dispositifs d’actualité, de vérifier et authentifier les sources des documents en ligne, de s’interroger sur l’agenda des opérateurs et les contraintes des plates-formes, de décrypter l’intention des messages pour en distinguer les fonctions et de surveiller le destin de leurs données. Dans ce contexte, l’EMI qui promeut l’esprit critique, la créativité, la citoyenneté, la communication interculturelle et la résolution de conflits par la prise en main des médias – est au cœur
des compétences attendues des élèves du XXIe siècle afin de s’assurer que les acquis démocratiques du XXe siècle opèrent leur transition à l’ère numérique.
Afin d’être efficace, il est aussi nécessaire d’établir une continuité éducative dans et hors l’école car l’EMI présente le potentiel d’engager tous les acteurs autour de l’enfant (parents, associations, médias, municipalités) et de réconcilier l’école avec son environnement de proximité […] La question du sens dans l’éducation aux médias et à l’information en France ne peut se dissocier du sens des médias dans la société et de leur nécessaire mutation vers des pratiques plus transparentes, plus critiques, plus pluralistes, ce que le numérique peut faciliter.
Bertrand Chavaroche, rédacteur en chef
Christian Gautellier, directeur de la publication